Un mois après son départ de la direction de Morcar Prod, siège qu'il a occupé quinze années durant, Ciné Merveilles a pu rencontrer Andrew Graber qui a accepté de nous accorder un entretien. L'occasion pour nous de dresser avec lui un bilan de sa carrière, et de l'interroger sur l'avenir de Morcar Prod et du cinéma de Gérardmerveille en général.
Ciné Merveilles : Andrew Graber, bonjour. Et tout d'abord merci de nous accorder cet entretien. Vous vous êtes tenu éloigné des médias depuis votre départ de la direction de Morcar Prod. Pour quelle raison avez-vous souhaité rester silencieux durant ce dernier mois ?
Andrew Graber : Je savais que mon départ allait faire la une des médias, et que je serais assailli de questions. Nous avons d'ailleurs choisi avec le Conseil d'Administration de Morcar Prod de garder l'information de mon départ secrète jusqu'au bout pour que je puisse sereinement terminer mon mandat et préparer la passation de pouvoir.
Ciné Merveilles : Pour quelle raison avez-vous décidé de quitter vos fonctions, après quinze années à la tête de Morcar Prod ?
Andrew Graber : A plus de 70 ans, vous ne croyez pas qu'il était temps que je passe la main ? J'ai beaucoup aimé toutes ces années passées chez Morcar Prod, mais à bientôt 72 ans, j'aspire aujourd'hui à plus de tranquillité. Il est temps que je profite d'une bonne retraite.
CJ : Vous êtes le recordman de longévité à la tête de la société, dépassant même le fondateur de celle-ci qui tout cumulé n'a œuvré "que" huit ans à la direction de Morcar Prod. Quel sentiment cela vous procure-t-il ?
AG : Une grande fierté pour la confiance que le Conseil d'Administration m'a accordée durant toutes ces années, d'autant plus qu'elles n'ont pas été toutes faciles. Et beaucoup de joie, car je pars avec énormément de bons souvenirs de toute cette période. En démarrant dans le métier du cinéma, je n'imaginais pas du tout occuper un jour ce type de fonctions et remplir ce type de mission.
CJ : En effet, si on regarde votre parcours, vous avez débuté comme scénariste, avec votre ami de toujours Alain Blakstad, pour la société Warner Interaction avant que vous ne le suiviez dans l'aventure Blakstad Films, toujours comme scénariste, et que vous enchainiez les succès avec plusieurs scénarios de la franchise Big Trouble que vous écrivez pour Gérard Cousin Prod, mais également l'écriture d'une trilogie au sein de la franchise Western Union, qui bouleversera à jamais celle-ci en introduisant de nouvelles notions avec différentes époques.
Et ce n'est que lorsqu'Alain Blakstad prendra la présidence de Morcar Prod que vous débuterez une nouvelle aventure en dirigeant Blakstad Films, ce qui vous permettra sans doute par la suite de prendre la présidence de Morcar Prod. Imaginiez-vous à l'époque, en acceptant de remplacer votre ami à la tête de sa petite société de co-production, que vous finiriez par diriger une société de la taille de Morcar Prod.
AG : Evidemment, non ! Quand Alain m'a demandé de le remplacer à la tête de Blakstad Films, il n'était question que d'une mission temporaire. Lui voulait tenter l'aventure à la tête de Morcar Prod, mais ne pouvait pas diriger à la fois cette société et la sienne. J'ai accepté de le remplacer, mais pour moi ce n'était qu'une sorte de contrat intérim'.
Et étant donné les résultats de Blakstad Films à l'époque, qui a été en difficultés et a fini par être rachetée par Morcar Prod, je ne pensais franchement pas qu'un jour on me confierait à nouveau la direction d'une société.
CJ : Vous êtes le créateur de franchises à succès de Morcar Prod, dont une qui existe encore aujourd'hui et compte plus de vingt cinq films sortis sur les écrans, Mark Reed. A une époque, on disait même de vous que tout ce que vous touchiez se transformait en or (Big Trouble, Western Union, Mark Reed, ...). Aviez-vous trouvé la recette du succès ?
AG : Vous savez très bien que s'il existait une recette au succès, il serait bien difficile de la garder secrète et tout le monde l'appliquerait. Je pense avoir juste eu de la chance et un peu de flair. L'idée de la franchise Mark Reed, tout comme celles de Chris Winston et la franchise Secret Action qui n'ont pas perdurées mais ont connu malgré tout un joli succès, n'était pas de moi au départ, mais d'Anna Bunnet. Elle m'a demandé de créer trois franchises d'action, espionnage et aventure. J'ai imaginé ces personnages, et créé ces trois franchises. Mais de mon point de vue, ce qui a participé au succès de Mark Reed est le fait que j'ai fait appel à plusieurs reprises et très rapidement à d'autres scénaristes pour travailler avec moi.
CJ : A partir du moment où Morcar Prod a racheté Blakstad Films, et où vous avez intégré les effectifs de cette société, vous avez connu la direction d'Anna Bunnet et Alexandra Chasen avant de vous même en prendre la direction. Quel souvenir gardez-vous de cette époque ?
AG : Je dois beaucoup à ces deux femmes qui m'ont appris les ficelles de ce métier. C'est grâce à Nikolas Morcar que j'ai intégré les effectifs en prenant la direction du studio MorGraph, mais c'est surtout auprès de ces deux femmes que j'ai appris tout ce qui m'a servi pour ensuite gérer Morcar Prod. Elles avaient toutes les deux une vision très différente de ce qu'elles voulaient produire, mais c'étaient avant tout deux très grandes Présidentes qui à mon avis ont beaucoup plus que moi marqué l'Histoire de la société, car elles ont donné aux productions Morcar Prod un tournant et une empreinte qui aujourd'hui encore se ressent dans nos films.
CJ : A force d'occuper de plus en plus de fonctions au sein de Morcar Prod, vous finissez par décider de laisser de côté le métier de scénariste. C'était il y a quinze ans déjà. N'avez-vous jamais ressenti de manque depuis, l'envie de vous remettre à l'écriture ?
AG : Etrangement non. Pendant un temps, j'ai cumulé les casquettes, mais lorsque j'ai décidé d'arrêter totalement l'écriture, je n'ai pas ressenti l'envie de m'y remettre depuis. Encore aujourd'hui, en quittant la direction de Morcar Prod, je n'ai pas envie de me remettre à l'écriture de scénario.
CJ : Aujourd'hui, vous avez cédé votre place de PDG à Ian Morcar, le fils du fondateur de la société. Qu'avez-vous pensé des critiques qui ont été faites à l'époque de sa nommination, de la part de personnes accusant cette nommination d'être le fruit d'un piston ? AG : J'ai travaillé pendant deux ans avec Ian, qui a dirigé Morcar Prod Television durant cette période, et je pense qu'il a été très bon. Nul doute qu'il a hérité de compétences de son père, et il connait cette société comme personne. Il est évident que son nom de famille n'a pas été un handicap pour sa candidature, mais le Conseil d'Administration, et notamment Nikolas Morcar, ne lui aurait jamais confié |
Et je peux déjà vous dire qu'il a pris à bras le corps un vieux projet de Morcar Prod, qui était à l'arrêt depuis plusieurs années, dans l'intention de lui donner un nouvel élan et de le faire aboutir. On pourrait même très bientôt en entendre parler.
CJ : Quels conseils auriez-vous à lui donner aujourd'hui ?
AG : Je me suis déjà entretenu avec lui à ce sujet, mais le principal conseil que je puisse lui donner est de suivre son instinct. Je suis assez fier d'avoir maintenu à flot Morcar Prod malgré ces dernières années difficiles pour le cinéma de Gérardmerveille, et très fier des résultats de ma dernière année de PDG, et j'espère qu'il parviendra à donner un nouvel élan à Morcar Prod pour qu'elle perdure encore dans les années qui viennent.
CJ : Vous faites bien d'aborder le sujet. Quel est votre regard aujourd'hui sur l'activité cinématographique de Gérardmerveille ?
AG : J'ai une vision très simple de la chose. Le cinéma de Gérardmerveille est ce que nous en faisons. Si aujourd'hui il se porte moins bien qu'il y a plusieurs années, c'est uniquement de notre faute à nous, producteurs, car le public répond toujours présent, lui.
Le fait de voir d'anciennes productions revenir récemment, telles que Dark Feather Production ou Pamya Prod, me fait plaisir, mais aussi et surtout l'arrivée de jeunes productions prometteuses comme la Production Pieds Secs ou canaldream. Je dis surtout elles car ce sont elles qui vont façonner le nouveau visage de Gérardmerveille, et c'est à nous producteurs, qui selon le fonctionnement du cinéma à Gérardmerveille participons aussi à l'accueil des nouvelles productions, de faire en sorte que celles-ci trouvent leur place et perdurent parmi nous.
Il parait évident que le cinéma de Gérardmerveille ne connaitra plus jamais l'essor qu'il a connu au cours des années 2000-2010, mais je reste persuadé qu'il peut trouver malgré tout un nouvel essor. Mais il ne faut plus compter sur moi pour ça (sourit).
CinéMerveilles : Encore merci de nous avoir accordé autant de temps. On vous souhaite une bonne continuation dans vos nouveaux projets, et peut-être à bientôt ?
Andrew Graber : Merci. Mais ne comptez pas trop me revoir, à moins de venir vous promener régulièrement sur la côte sauvage de Cinéjeu Island.